
« Aucune chance
de gagner la coupe du Monde »
Les
Blacks, qui attendaient cette finale depuis 24 ans, ne pouvaient passer à coté.
Après une large victoire quelques semaines plus tôt en match de poule, le pays
des kiwis s’attendait à voir les coqs pliés face au talent et à l’agressivité
des hommes en noir. Dans les jours précédant la finale, la presse néo-zélandaise,
gonflant le torse, fustigeait l’équipe de Marc Liévremont. Sans demi-mesure. « Les Turkeys (les Dindons) n'ont aucune
chance de gagner la Coupe du monde », pouvait-on lire à la Une du quotidien
The Dominion Post. Et de prophétiser : « Nous avons une main sur la Coupe Webb-Ellis ». Le chroniqueur
Peter Bills, surenchérissait dans les colonnes du New Zealand Herald, principal quotidien du pays, jugeant que le
Quinze de France « trahissait l'héritage
du rugby français dans son ensemble ». « Ils ne méritent pas d'être là. Espérons qu'ils seront battus en finale,
au nom du rugby actuel et de l'avenir à long terme du rugby français »,
écrivait dans le même journal l'ancien international anglais Stuart Barnes.
Certes,
le parcours de nos bleus fut laborieux et la victoire en demi-finale face aux
valeureux gallois ressemblait à un miracle. Mais en sport, le mérite n’existe
pas. Et c’est la Nouvelle Zélande toute entière qui l’a appris, à nos dépends, lors
de la finale.
On leur avait promis l’enfer.
Ils s’y étaient préparés.
Comme
un symbole, le visage du capitaine français, Thierry Dusautoir, dans le long
couloir menant vers la pelouse et la gloire. Pas un sourire, pas un frisson. Le
visage figé comme le mur d’airain que les bleus opposeront à leurs adversaires
pendant quatre-vingt minutes. Au bout du
tunnel, l’Eden Park et ses 60 000 spectateurs. Face au Kapa O Pango,
sombre et bruyant, les bleus, main dans
la main, opposent un « V » muet, d’un blanc immaculé. Thierry
Dusautoir est la pointe d’une flèche humaine tirée contre les Blacks. Avançant
vers leurs adversaires, nos bleus sont comme en 1999 et en 2007 à la hauteur du
défi lancé par la plus grande nation de rugby au monde. Jérôme Kaino dira après
la finale : « Pendant le Haka,
j’ai fixé Thierry Dusautoir. Dans ses yeux, il y avait du feu ». Celui
là même qui devait griller les plumes du Quinze tricolore.
Proposer
un défi symbolique au Haka est une chose. Faire douter ces blacks là par un
combat de tous les instants, en est une autre. Pendant 80 minutes, sur la
pelouse du stade semblait se jouer la bataille d’un autre temps. Celle de
quinze dieux descendus de l’Olympe face à d’implacables Géants. Il existe des hommes s’affaissant sous l’étiquette de favori, et se
transcendant quand on ne les attend plus.
Ces rugbymen là étaient de ces hommes là. D’une fierté qui décuple. Des compétiteurs
que le challenge grandit.
Parra outragé !
Parra brisé ! Parra martyrisé !
La
France fut vite menée au score après l’essai de Woodcock à la 15e
minute sur une combinaison en touche. A la 46e minute, Donald
ajoutait trois points pour les All Blacks, 8-0. L’avance était faite. C’était
sans compter la hargne de Thierry Dusautoir, élu homme du match, qui marquait une minute plus tard au pied des poteaux. La France revenait à un point.
Les minutes s’égrenaient ainsi que nos espoirs. Aucune pénalité n’était « offerte »
par M. Joubert, l’arbitre du match. Quand il siffla enfin, c’était pour
signaler la fin de la rencontre. La Nouvelle-Zélande redevenait championne du
monde de rugby dans leur jardin d’Eden. Les bleus, genoux à terre, regards au
ciel, perdaient pour la troisième fois une finale de coupe du monde après avoir
dominé un match qui ne semblait plus pouvoir leur échapper. A Auckland, la nuit
était sombre ; les coqs ne chantaient plus ; seuls les kiwis
dansaient.
Tuméfié,
le visage de Morgan Parra après le match témoigne encore de la violence de l’affrontement.
Certes, le Quinze de France a retrouvé des couleurs, renouant avec des valeurs qui
font la force de ce sport : courage, combat, solidarité ;
Bien
sûr, les hématomes, les contusions, et les meurtrissures disparaitront avec le
temps.
Mais
les regrets, eux, resteront pour l’éternité.
TLG.
TLG.
(Reuters)
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